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Tutelles, curatelles et protection juridique des majeurs

Publié le

Nouveau au 20/08/2012

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En 2012, les sénateurs se sont penchés sur les effets de la nouvelle loi surtout d’un point de vue comptable. Pour l’instant, je n’ai rien vu sur le point de vue des majeurs protégés ou des conséquences pour eux des aléas de la protection.

Je reviendrai sur la question bientôt. En attendant, si vous en avez le courage, vous pouvez vous pencher sur les rapports suivants

http://www.senat.fr/compte-rendu-commissions/20120130/fin.html#toc2

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Nouveau :  sur l’émission du 15 octobre 2011 ici https://laconnectrice.wordpress.com/2011/10/17/tutelles-curatelles-sur-m6/

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Mercredi soir, France 3 diffusait son magazine « Hors Série » intitulé: « Tutelles, nos parents spoliés ». Présenté par Samuel Etienne, le documentaire suivait quelques cas de tutelle abusive et assez spectaculaires, donnait la parole à des tuteurs, des personnes protégées, des magistrats et des membres de la famille.

http://programmes.france3.fr/documentaires/index-fr.php?page=documentaires-archives-articles-detailles3&id_article=1053

NB pour simplifier, je mets sous le terme « tutelle », la tutelle, la curatelle simple, la curatelle renforcée et la sauvegarde de justice. De même, j’utilise le terme « tuteur » aussi bien pour les curateurs.

L’émission a scandalisé certaines personnes qui se sont étonnées que des tuteurs voleurs ne soient pas sanctionnés tandis que d’autres téléspectateurs se sont émus du parti pris de l’émission.

Le but de l’émission était de dessiner une esquisse de la problématique des majeurs protégés dans le sillage de la réforme de 2007 qui, en principe, accorde plus de respect et d’écoute à la personne sous tutelle et accroit les obligations de formation et de transparence des tuteurs.

http://www.net-iris.fr/veille-juridique/dossier/16873/la-reforme-de-la-protection-juridique-des-majeurs-archive.php

Malheureusement, de très mauvaises habitudes ont été prises par les organismes de tutelle, en général des associations comme l’Udaf, une énorme machine fédérant des centaines d’associations locales ou d’autres associations plus modestes mais incontrolables faute de moyens.

Si on  considère que la France dispose seulement de 75 juges des tutelles pour environ 800 000 majeurs protégés, on comprend vite que les contrôles et les bonnes décisions prises dans l’intérêt des personnes fragiles sont quasiment impossible à effectuer dans le cadre de la nouvelle loi qui est pourtant remplie de bonnes intentions. En effet, le juge ne peut pas lancer des contre expertises sur tous les certificats de psychiatres assurant que le majeur est incapable de gérer ses biens. Et la plupart des majeurs ne peuvent pas prendre un avocat pour défendre leurs intérêts contre une décision de tutelle qu’ils jugent injustifiée, soit parce qu’ils n’en ont pas les moyens, soit qu’ils ne sont pas avertis de pouvoir le faire, soit qu’ils sont réellement incapables de gérer leur situation.

Au cours du débat qui a suivi la diffusion du reportage, le procureur Eric de Montgolfier a résumé la situation en disant que là où il y avait de l’argent, il y avait du business et que sans contrôle, tout business peut déraper.

Le mot contrôle a été cité des dizaines de fois dans le documentaire et dans le débat. Le contrôle est nécessaire, il faut contrôler mais l’Etat n’en a pas les moyens. Magistrats, curateurs, majeurs protégés, familles de majeurs protégés, tout le monde le sait, tout le monde le constate mais l’Etat se contente de toiletter les lois sans donner aux acteurs les moyens de les faire respecter. On ne peut pas traiter sérieusement la question des tutelles sans augmenter le nombre de juges des tutelles, le nombre des greffiers et d’enquêteurs spécialisés.

Un majeur protégé perd la main sur le contrôle de ses revenus et de son budget dont la gestion est confiée au tuteur qui, selon la nouvelle loi, doit ouvrir un compte au nom du majeur protégé, en tenir la comptabilité et la présenter une fois par an au juge des tutelles, lequel n’a pas le temps, même avec l’aide de son greffier de les éplucher. Le juge et le greffier n’ont pas de formation comptable.

Lire aussi « Pourquoi les majeurs protégés se rebiffent » à propos de la mise sous tutelle de Bettencourt https://laconnectrice.wordpress.com/2011/06/14/curatelle-renforcee-pour-liliane-bettencourt/

Le médiateur de la République avait demandé que les revenus des majeurs protégés soient gérés par le Trésor public mais devant le tollé manifesté par les tuteurs, les banques et les notaires, les législateurs ont capitulé. Pourtant, différentes études avaient démontré avant 2007 que la situation était critique. Le « Lien social » avait publié une étude déjà en 2 000.http://www.lien-social.com/spip.php?article1291&id_groupe=8 et un avis sur la réforme des tutelles en 2006http://www.lien-social.com/spip.php?article1293&id_groupe=8

Il semble que, malgré de nombreux faits avérés d’abus de faiblesse et de dysfonctionnements portés à la connaissance des gouvernements, trop d’intérêts financiers soient en jeu pour que la gestion des majeurs protégés soit véritablement assainie.

Heureusement, et le documentaire l’a montré, il existe des associations de gestion de tutelles et des tuteurs et curateurs compétents, correctement encadrés et formés et réellement désireux de venir en aide aux personnes fragiles. Cela ne suffit pas mais autorise les majeurs protégés s’ils peuvent le formuler et leur entourage à saisir le juge des tutelles pour demander un changement de mandataire s’ils estiment qu’ils sont mal pris en charge ou spoliés. Les services sociaux ont certainement un rôle à jouer dans le signalement de ces cas.

On peut aussi saisir le Médiateur de la République, Jean-Paul Delevoye qui est en partie à l’origine de la réforme des tutelles :

http://www.lemediateuretvous.fr/fr/search?q=tutelle&search_debate=1&submitsearch.x=23&submitsearch.y=10&submitsearch=OK